« Job Express » est un projet pilote développé par la municipalité de Hoje-Taastrup dans le cadre du programme « Villes pour tous » mis en place par le Ministère de l’Immigration et de l’Intégration en 2002. Il vise à favoriser l’intégration ainsi que le retour à l’emploi des personnes issues de l’immigration résidant dans certains quartiers sensibles. Outre Hoje-Taastrup, quatre villes ont été retenues pour mener à bien ce programme. Rune Baeklund, chef de projet pour la municipalité de Hoje-Taastrup revient pour nous sur cette initiative et plus particulièrement sur son projet phare, « Job Express ».
Eurêka 21 : En quoi a consisté le programme « Villes pour tous » ?
Rune Baeklund : Ce programme a été lancé par le Ministère de l’Immigration et de l’Intégration. Il avait pour but de promouvoir l’emploi et l’intégration des personnes issues de l’immigration résidant dans les quartiers sensibles via notamment la mise en place de partenariats public-privé. Chaque ville sélectionnée a été étroitement associée à la mise en place et au déroulement du programme en fixant ses propres objectifs et méthodes. Le programme offrait donc une grande liberté à la fois aux collectivités locales pilotant les initiatives sur leur territoire et aux porteurs de projet en charge de les mettre en œuvre.
E21. : La réussite de ce programme repose essentiellement sur les partenariats public-privé. Qu’ont-ils concrètement apporté ?
R.B. : La mise en place par la municipalité de partenariats public-privé avec différentes entreprises et institutions de formation régionales, nous a permis de développer des initiatives que nous n’aurions jamais mis en place sans l’apport et le soutien de partenaires privés. Un des exemples les plus significatifs est probablement l’accompagnement temporaire des travailleurs étrangers ne maitrisant pas le danois sur leur lieu de travail mis en place par l’équipe municipale en partenariat avec le centre de formation linguistique local. Chaque partenariat s’est concrétisé par un accord de coopération spécifique portant sur une ou deux actions soumises au Comité de pilotage pour validation. Dans la pratique, la réussite et la portée des différents projets mis en place dans le cadre de partenariats public-privé ont été très hétérogènes. Certains projets comme « Job Express » ont été extrêmement ambitieux alors que d’autres beaucoup moins.
E21. : Pouvez-vous nous en dire plus sur le projet « Job Express » ?
R.B. : L’objectif de l’initiative était de développer et tester de nouvelles méthodes favorisant le retour à l’emploi de personnes confrontées à un certain nombre de difficultés socio-économiques. Projet pilote de la municipalité, l’initiative se détache du centralisme traditionnel en matière de politique de l’emploi pour s’ancrer dans un contexte local bien spécifique. Il propose une approche nouvelle basée sur une plus grande proximité avec les usagers ; le pari étant que cette proximité favorise un retour plus rapide à l’emploi des bénéficiaires. Pour ce faire, un soutien et un conseil personnalisé ont été mis en place.
E21. : Quelles ont été les méthodes appliquées ?
R.B. : Le projet reposait essentiellement sur l’idée que les zones sensibles ayant un faible taux d’activité nécessitaient une attention toute particulière. Seul un soutien et un accompagnement individualisés peuvent permettre aux personnes exclues du marché du travail de surmonter leurs difficultés. Les membres de l’équipe municipale recrutés pour ce projet, ont été choisis non seulement pour leur engagement mais aussi pour leur connaissance du quartier et de ses habitants. Ceci a permis de retisser des liens de proximité entre le personnel de la municipalité et les résidants. De plus, la création de différents partenariats avec des acteurs clés de la vie locale comme les bailleurs sociaux, la maison des associations et le centre de formation professionnelle a contribué à apporter une réponse globale aux problèmes rencontrés par les résidents. Plusieurs initiatives ont été mises en place, notamment à destination des plus jeunes : soutien scolaire, offres de « petits boulots », orientation professionnelle, etc. Enfin, notre service se situant dans le même bâtiment que les services sociaux et pour l’emploi de la municipalité, a considérablement facilité notre travail en garantissant une plus grande coopération et coordination entre les différents services de la ville intervenant au sein du quartier de Taastrupgaard.
E21. : Avez-vous rencontré des difficultés particulières au cours du projet ?
R.B. : Non, très peu. Je pense que l’engagement de la municipalité y a été pour beaucoup, notamment dans sa capacité à rassembler l’ensemble des parties prenantes autour de ce projet. En outre, je pense que la volonté de faire de cette initiative un projet pilote a également joué en notre faveur en nous offrant une grande liberté d’action qui nous permettant d’innover et d’expérimenter de nouvelles méthodes.
E21. : Quel a été l’impact de ce projet sur les politiques de l’emploi ?
R.B. : L’initiative n’a plus cours aujourd’hui. « Job Express » était un projet pilote mis en place dans le cadre du programme « Villes pour tous » mis en place en 2002. Il a pris fin en 2007. Il n’en demeure pas moins, que le projet a considérablement contribué à modifier les politiques de l’emploi, tout du moins au niveau local. Les méthodes et approches développées dans le cadre de « Job Express » ont été diffusées et intégrées par les différents services publics chargés de l’emploi et des prestations sociales. Les mesures d’accompagnement personnalisé ont été généralisées tout comme l’idée d’une intervention rapide et coordonnée.
E21. : Pensez-vous que le projet est adapté à la situation actuelle ?
R.B. : Oui et non. La situation de l’emploi a beaucoup changé depuis 2007. A l’époque, il n’y avait aucune raison pour que les personnes que nous suivions ne réintègrent pas le marché de l’emploi. Ces dernières possédaient en effet les compétences nécessaires pour trouver un travail rapidement mais étaient limitées par des barrières linguistiques et culturelles. Aujourd’hui, étant donné la situation économique, elles éprouveraient davantage de difficultés à trouver un emploi et ce, quel que soit l’accompagnement proposé. Les personnes résidant dans un quartier sensible étant les plus vulnérables à la crise, il est primordial de poursuivre le travail d’accompagnement et de proximité entamé avec le projet « Job Express ». Il est donc important de développer les actions d’accompagnement et de soutien individuel afin de renforcer les compétences et les connaissances linguistiques des personnes exclues du marché du travail. Cela passe par des actions de tutorat, de formation professionnelle et de parrainage. Ce type d’initiatives représentent un cout significatif mais font preuve d’efficacité pour accroitre le taux d’activité et diminuer les dépenses liées aux prestations sociales.
E21. : Quels conseils donneriez-vous à d’autres collectivités souhaitant se mobiliser pour l’emploi ?
R.B. : Les méthodes et les approches développées au sein du projet « Job Express » ne peuvent pas devenir la règle. Néanmoins, le projet a eu le mérite de souligner qu’il est possible, lorsque l’on se donne les moyens, de lutter contre la précarité dans laquelle se trouve une frange croissante de la population. Alors que l’aide à l’emploi est souvent centralisée, il est nécessaire de développer des politiques locales favorisant l’émergence de mesures d’accompagnement personnalisé à destination des publics les plus fragiles. Les politiques nationales et régionales en faveur de l’emploi doivent impérativement aller de pair avec des politiques locales à l’échelle d’une ville voire d’un quartier.
Propos recueillis par Rémy Mazet pour Eurêka 21
A découvrir également sur notre site : l’article consacré à l’initiative de la municipalité de Hoje-Taastrup intitulée « Job Express »