Jobrotation : expérimentation de la méthode danoise en France

avril 2010 4 min de lecture

Jobrotation est une méthode danoise originale répondant à deux finalités : le développement de la formation des salariés d’une part, et la qualification et l’insertion professionnelle des demandeurs d’emploi de l’autre. Un salarié en entreprise est envoyé en formation ; se crée ainsi un poste de remplacement sur lequel on positionne un demandeur d’emploi. Il s’agit de faire d’une pierre deux coups : d’un côté on améliore la qualification des salariés, tout en facilitant la réinsertion professionnelle des personnes éloignées de l’emploi.

 

En 1997, la coopérative de conseils lilloise E2i est sollicitée par les responsables du réseau européen « EU Jobrotation » dans le cadre du Programme d’initiative communautaire (PIC) « Adapt ». Sa mission : transférer la méthode danoise en France. Une étude de transférabilité financée par la région Nord Pas de Calais menée par E2i. Elle permet d’effectuer un repérage des entreprises intéressées, d’identifier les acteurs concernés, et d’ébaucher le futur réseau porteur de l’expérimentation. Un premier groupe ressource de six chefs de projet est formé par E2i. Il se compose de différents acteurs publics ou privés de l’insertion professionnelle (plans locaux de l’insertion et de l’emploi, missions locales) et de la formation et entreprise (type OPCA, organismes paritaires collecteurs agréés). Ce groupe s’enrichit tout au long de l’expérimentation, au fur et à mesure que les projets Jobrotation se multiplient.

Jobrotation répond à deux problématiques qui caractérisent bien les difficultés du contexte socio-économique français depuis quelques décennies déjà. Celle d’un chômage de longue durée qui touche une partie toujours plus importante de la population, et qui prend toute son ampleur avec la crise financière, et celle de l’insuffisance de la formation pénalisant la compétitivité des entreprises françaises. Si Jobrotation ne débouche pas obligatoirement sur l’embauche du demandeur d’emploi assurant le remplacement au sein de l’entreprise, elle lui permet néanmoins d’améliorer ses qualifications, de rompre le cycle de l’inactivité. Autant d’éléments qui faciliteront sa future réinsertion. La méthode Jobrotation en France vise prioritairement les chômeurs de longue date, déconnectés des réalités du monde de l’entreprise, qui ont parfois perdu pied. Cette période de remplacement, aussi temporaire soit-elle, leur permet de renouer avec le monde du travail, de reprendre des horaires, de se remettre debout.

Le deuxième volet de cet outil propose un accompagnement des entreprises dans l’identification de leurs besoins en formation, la sélection du prestataire de formation, le suivi et le bilan de celle-ci. Les entreprises, et plus particulièrement les PME, ne peuvent mobiliser ces compétences en interne. A cela s’ajoute le problème du remplacement du salarié en formation, dont le départ ampute souvent leurs activités. Ainsi, les deux faces du concept danois, la réinsertion professionnelle des demandeurs d’emploi d’une part, et la formation des salariés d’entreprise de l’autre, sont complémentaires. L’articulation de ces deux aspects fait toute l’innovation et l’ingéniosité de la méthode.

E2i a désormais fini sa mission de pilotage. La machine est lancée, des projets Jobrotation continuent d’émerger en France. Tel le Plan local de l’insertion et de l’emploi (PLIE) d’Arras, pour ne citer que lui. Depuis l’expérimentation, il a créé un poste chargé de mission « Jobrotation ». Ce qu’il manque maintenant, c’est un suivi et une évaluation approfondie de la méthode en France. Quel accueil a-t-elle reçu des entreprises ? Combien totalise-t-on de projets sur le territoire national ? Quels sont les secteurs d’activités prioritairement concernés ? Quelle est la taille des entreprises ? Ces éléments sont indispensables afin de mesurer l’adaptabilité de la méthode aux entreprises, et de l’améliorer le cas échéant.

Zita Tugayé, Eurêka 21

A découvrir : Sophie Delebarre-Lorens, chargée du projet chez E2i, répond aux questions d’Eurêka 21

Pour en savoir plus :
Fiche d’expérience du projet
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Découvrez l’interview de Sophie Delebarre-Lorens, en charge de la mission Jobrotation au sein de la coopérative de conseils E2i.