Ici et en Europe, les quartiers sensibles bougent ! – Dossier thématique
En France, 29% des personnes résidant en zone urbaine sensible vivent en dessous du seuil de pauvreté. Cette situation reflète la qualité de vie particulièrement difficile des habitants résidant dans ces quartiers difficiles. Logements délabrés, accès aux soins restreints, déscolarisation, chômage et violence, les quartiers concentrent de nombreuses difficultés. Mais ce sont aussi des lieux d’expérimentation de projets pilotes, d’initiatives originales et de créativité, où les acteurs de la société civile et les collectivités locales se mobilisent collectivement.
Impliquer les habitants dans la réhabilitation de leur cadre de vie
Rotterdam – Faire le choix de la réhabilitation plutôt que de la destruction
Le quartier de Spangen est une zone particulièrement dégradée de la banlieue de Rotterdam. Afin de favoriser sa réhabilitation, la municipalité a donc entrepris un programme ambitieux basé sur la participation des habitants dans le processus de rénovation des logements anciens. Cette initiative fait suite à un projet initié en 2005. A l’époque, la municipalité cède gratuitement la moitié du Wallisblok, un ensemble d’habitations particulièrement dégradé à des jeunes acheteurs potentiels qui décident alors de s’occuper eux-mêmes de la rénovation de leur logement. Le projet est un véritable succès. En très peu de temps, le quartier est métamorphosé par ces nouveaux résidents qui contribuent à réhabiliter le patrimoine local plutôt qu’à le détruire. Grâce à une communication avisée, la municipalité parvient même à redynamiser l’ensemble du tissu économique local en attirant de jeunes artistes, des restaurateurs, et tout un ensemble de petits commerces. Aujourd’hui, l’opération se poursuit avec la vente par la municipalité d’une centaine de logements délabrés pour près de 1 500 candidats déclarés.
Retrouvez l’article sur la réhabilitation du quartier de Spangen sur www.eureka21.eu
Bristol – Permettre aux jeunes de s’emparer de leur environnement
Le quartier de Hartcliffe and Withywood de la ville britannique de Bristol a fait l’objet d’un vaste programme de réaménagement auquel fut associée une équipe de jeunes « Spacemakers ». Ce projet est une initiative de la municipalité souhaitant impliquer des jeunes déscolarisés dans la réhabilitation de leur quartier. A la suite de réunions d’informations dédiées aux jeunes et à leurs parents, un premier groupe de 16 jeunes âgés de 13 à 15 ans a été constitué. Ils ont suivi une préparation spécifique encadrée par une équipe constituée d’un architecte, d’un éducateur, de deux conseillers d’éducation et d’un artiste du quartier. Ils ont aussi bénéficié d’un cours sur la conception d’espaces publics, sur la régénération urbaine et la planification mais aussi sur la négociation et la prise de parole en public. Les jeunes ont choisi un site parmi dix espaces publics mis à disposition par la municipalité. Ils ont travaillé avec un architecte paysagiste à la conception d’un espace public pour redonner vie à leur quartier. Inauguré en 2004, le projet d’aménagement a donné naissance à un magnifique exemple de nature urbaine où des poutres d’acier côtoient des chênes centenaires. Un succès qui a incité la municipalité de Bristol à étendre la méthode à d’autres projets de réaménagements.
Améliorer la qualité de vie en améliorant l’offre de service aux populations
Caen – L’accès à la santé devient un droit pour tous !
Les inégalités d’accès aux soins se sont considérablement accrues à Caen, à l’instar d’autres villes en France. En quelques mois, trois médecins ont quitté le quartier sensible de la Grâce-de-Dieu. Des médecins généralistes et des élus locaux ont fondé l’association « Pôle santé Grâce-de-Dieu » pour maintenir une offre de soins de premier secours. En 2007, ils mènent une consultation auprès des habitants afin d’identifier les thématiques à développer. Cela a donné lieu à la création de groupes d’actions autour de l’alimentation, du sommeil, du sport et de la santé. Cette dynamique se poursuit dans le cadre du Pôle Santé mis en place par la municipalité en 2010. Il assure aux habitants du quartier une offre de soins pluridisciplinaires ainsi que la présence de médecins de proximité. Les différents services se concentrent dans un bâtiment neuf de plusieurs étages ou se côtoient quotidiennement plusieurs spécialistes dont trois médecins, deux infirmiers, deux kinésithérapeutes, deux orthophonistes, un chirurgien-dentiste, un pédicure, un podologue et un psychologue.
On y trouve également la Maison des addictions à laquelle sont rattachés à temps plein quatre médecins, une assistante sociale et deux animatrices. Cette interdisciplinarité permet de coordonner les actions des professionnels de la santé pour un meilleur suivi des patients, d’accroitre la prévention et de diminuer les inégalités d’accès aux soins. En parallèle du pôle santé, un groupe de travail réunissant des professionnels de santé et différents acteurs du quartier s’est fixé pour objectif de mettre en place un projet se santé participatif.
Bordeaux – L’insertion professionnelle grâce aux Pitchoun’
Dotée de 42 places pour accueillir les tout-petits de 2 mois à 4 ans, le centre petite enfance du quartier Bastide n’est pas tout à fait comme les autres. Outre la démarche environnementale adoptée pour la réhabilitation d’un ancien garage en une crèche, c’est dans son approche sociale que le centre géré par l’association « Pitchoun’ » se distingue. Il propose un service d’accueil avec de très larges plages horaires de 7h30 à 20h. L’association propose également un service d’accueil à domicile assuré par plusieurs assistantes maternelles travaillant en étroite collaboration avec le centre petite enfance. Ils permettent de répondre à une forte demande pour un accueil en horaires décalés notamment de la part de familles en difficulté et de familles monoparentales souhaitant accéder à un emploi ou à une formation. De plus, si les demandes sont étudiées comme ailleurs en fonction de l’âge de l’enfant, la situation familiale est aussi systématiquement prise en compte. Un quart des enfants accueillis par la structure bordelaise sont ainsi issus d’une famille monoparentale.
Miser sur l’avenir en impliquant les plus jeunes dans la vie de leur quartier
Amsterdam – La réhabilitation des quartiers sensibles passe aussi par les enfants
Afin d’améliorer le cadre de vie d’un quartier sensible de la banlieue d’Amsterdam, la fondation « De Bakkerij » a développé une approche originale se basant sur l’implication des plus jeunes. Intitulé « Kiwi », cette méthode consiste à donner la parole aux enfants du quartier et à les inviter à laisser libre cours à leur imagination. Au cours d’ateliers de travail ludiques, les enfants apprennent à réfléchir à leur cadre de vie, aux améliorations qu’ils peuvent ou aimeraient apporter à leur quartier. Un artiste supervise chaque atelier et les aide à exprimer leurs idées à travers des projets communs. L’ensemble des propositions des enfants sont alors présentées et débattues avec les parents. Une étude de faisabilité des projets sélectionnés est réalisée par des professionnels avant leur mise en œuvre conjointe par les enfants et les parents. La plupart des initiatives sont des microprojets faciles à mettre en place comme la rénovation de halls d’immeubles, par exemple. Mais leur impact sur la qualité de vie des habitants est non négligeable, en témoigne le succès de la méthode reprise depuis dans d’autres quartiers d’Amsterdam.
Rotterdam – Apprendre à communiquer tout en s’amusant !
Comment renforcer la cohésion sociale au sein d’un quartier où se côtoient de nombreuses nationalités aux langues et cultures différentes ? Dans de nombreux quartiers de Rotterdam, un grand nombre d’habitants ne maitrise effectivement pas la langue néerlandaise. Au sein du quarter d’Oude Noorden, la municipalité soutient la création d’un studio de langues et médias intitulé « De Maakwereld ». Dédié aux enfants du quartier, il leur permet d’améliorer leurs compétences linguistiques tout en participant à des activités créatives et ludiques. Au total, une soixantaine d’activités culturelles ont été organisées allant de la création et de la publication de revues et de programmes télévisés à la composition de poèmes et la réalisation de pièces de théâtre. Le projet donne confiance aux enfants et stimule leur sentiment d’appartenance au quartier. Avec plus de 10 000 participants, le studio est une véritable réussite et presque toutes les écoles primaires du quartier y ont désormais recours.
Entreprendre : une nouvelle façon d’agir !
Londres – Aider les femmes à construire leur propre avenir
L’East End est une terre de contrastes ! Malgré l’installation d’un des plus importants centres d’affaire londoniens, un grand nombre de femmes issues des communautés immigrées sont toujours confrontées à de nombreuses difficultés pour accéder à des emplois convenablement rémunérés. Outre la barrière culturelle et linguistique, elles manquent souvent de connaissances et surtout de confiance en elles. Le projet « Tower Hamlets Women’s Entreprise » mis en place par l’association Account3, a été conçu afin de permettre aux femmes d’accéder à un travail rémunéré, à une formation ou à un soutien à la création d’entreprises. Un programme en plusieurs étapes a été élaboré proposant une aide à la conception d’entreprises et des ateliers de formation dans les domaines comptables, juridiques et managériales. Une salle de documentation et de travail a également été créée afin de permettre aux femmes de développer leur projet hors de chez elles. L’association a ainsi contribué à créer une soixantaine de petites entreprises indépendantes contribuant à renforcer le tissu économique local.
Retrouvez l’article et l’entretien de Toni Meredew, directrice de l’association Account3 sur www.eureka21.eu
Bruxelles – Développer la culture de l’entreprenariat grâce au jeu avec « j’Entreprends@Bruxelles »
Implanté au sein du Quartier Saint-Gilles dans la banlieue bruxelloise, l’association Groupe One sensibilise les publics défavorisés à la culture de l’entreprenariat. L’originalité de cette initiative d’alphabétisation économique tient surtout dans la méthode utilisée : un jeu interactif pouvant être adapté aux besoins de chacun. « J’entreprends@Bruxelles » met les participants en situation dans un contexte entrepreneurial donné. Cet apprentissage par l’expérience leur permet de mesurer leurs responsabilités, de tirer les leçons de leurs erreurs et de stimuler leur créativité. Le jeu s’articule en plusieurs modules abordant différentes thématiques et se terminant par des débriefings visant à vérifier et conforter les acquis. Destinée tant aux jeunes qu’aux adultes, flexible dans sa durée autant que dans son contenu, cette formule permet à chacun de tirer profit de sa formation quelle que soit son expérience. Gratuite jusqu’à fin 2006, 850 personnes ont été formées sur deux ans et demi. Aujourd’hui, cette méthode permet toujours de former chaque année plus de 150 personnes issues des écoles du quartier.
Retrouvez l’article et l’entretien de Alexandre Bertrand, accompagnateur à la création d’entreprise sur www.eureka21.eu
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